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10/09/2008

L'INDIVISIBILITÉ…

« Dogme majeur de la vision des révolutionnaires de 1789, l'indivisibilité de la République est l'un des points les plus controversés par les constitutionnalistes internationaux. La pratique constitutionnelle, tant française qu'internationale, tend néanmoins à relativiser ce concept. Affirmée par l'article 2 de la Constitution du 4 octobre 1958, l'indivisibilité de la République prend ses racines dans la Révolution de 1789. Énoncée dès 1791, elle devient, le 25 septembre 1792, un principe définitivement attaché à la République.

DÉCOULE DE LA SOUVERAINETÉ NATIONALE…

Affectée d'un fort coefficient politique, le principe de l'indivisibilité découle de la « souveraineté nationale. » La nation forme une communauté unique fondée sur le vouloir vivre collectif de ses membres. Son unicité est renforcée par la souveraineté qui lui est attribuée. Nation et souveraineté sont incompatibles avec toute idée de division ou de sécession. La nation ayant pris la forme républicaine, la République est indivisible.


PRÉTEND FUSIONNER LES CONCEPTS DE NATION, D'ÉTAT ET DE RÉPUBLIQUE

Le principe de l'indivisibilité est souvent difficile à distinguer de notions voisines telles que l'unité de la République ou l'intégrité territoriale de l'État. La première ne figure plus dans le texte constitutionnel et la seconde est simplement confiée à la garde du chef de l'État. On considère généralement que l'indivisibilité de la République est traditionnellement protégée par des dispositions législatives relative à la préservation de l'intégrité du territoire national (article 86, 87 et 88 du Code Pénal, lois du 1er juillet 1901 et du 10 janvier 1936). Tout en transformant l'indivisibilité de la République de postulat politique en notion juridique, la jurisprudence constitutionnelle française n'a pas supprimé la confusion. Elle a mis en lumière trois domaines d'application du principe :

LA COMPOSITION TERRITOIRIALE DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Tout d'abord, l'indivisibilité garantit la composition territoriale de la République. Lors de la mise en place de la Ve République, seuls les territoires d'outre mer disposaient de la faculté de quitter la République immédiatement ou dans le cadre de la Communauté. Les autres composantes territoriales ne peuvent évoluer qu'au sein de la République et dans les conditions posées par la Constitution. C'est l'article 53, alinéa 3, complété par l'interprétation constructive du Conseil constitutionnel qui énonce les changements permis.

LE DROIT À LA SÉCESSION

La République peut céder (Comptoirs indiens), échanger, s'adjoindre un territoire ou même admettre la sécession, sous réserve de l'accord des populations intéressées et du Parlement (français). Mais en dehors de cette procédure, aucune modification ne peut être apportée à la composition territoriale de la République. Le législateur peut changer le statut d'une partie du territoire, par exemple en créant une nouvelle collectivité, mais il ne peut utiliser le principe de libre administration pour conférer à une collectivité territoriale le droit de sécession (NDLR : pour ce faire il doit organiser un référendum).

LE POUVOIR NORMATIF DE L'ÉTAT

Ensuite, l'indivisibilité régit l'exercice du pouvoir normatif de l'État. Le pouvoir normatif initial appartient exclusivement aux autorités de l'État. Les autorités locales ne détiennent ni la compétence d'auto-organisation, ni une compétence législative. Elles ne peuvent modifier, abroger ou retirer une norme qu'en vertu de la délégation prévue par la Constitution (article 72) et concrétisée par la loi. Cette délégation ne peut être ni générale, ni absolue ; elle ne peut porter sur une compétence réservée à une autorité de l'État ; elle est plus ou moins étendue selon la catégorie de collectivités territoriales, avec un maximum pour les territoires d'outre-mer (à l'époque où ce texte a été rédigé, NDLR). Elle n'est jamais incontrôlée : l'autorité étatique peut toujours, par voie juridictionnelle ou administrative, anéantir une norme édictée par une autorité locale. Enfin, l'indivisibilité s'oppose à des transferts de souveraineté à une organisation internationale. Dans sa décision du 30 décembre 1976, à propos de l'élection au suffrage universel de l'Assemblée des Communautés européennes, le Conseil constitutionnel a distingué entre les limitations de souverainetés, compatibles avec le principe de l'indivisibilité, et les transferts de souveraineté qui lui sont contraires. Ainsi, l'élection de l'assemblée européenne ne saurait entraîner une extension des compétences de cet organe, que seule une modification des traités relatifs aux Communautés européennes, dans les conditions prévues par la Constitution, pourrait réaliser. Au final, l'indivisibilité de la République interdit une intégration européenne plus forte, sans une révision de la constitution (1). Par une interprétation stricte de cette décision, la loi du 7 juillet 1977 fait du territoire de la République (française, ndlr) une circonscription électorale unique pour la désignation des représentants à l'Assemblée européenne. »

 

Jacques Bourdon

Professeur d'université

Enseignant de droit public à Université d'Aix-Marseille III.

Diplômé de l'Institut d'études politiques d'Aix-en-Provence

Docteur d'Etat en droit public

 

 

Alain Lamassoure, député de Bayonne (en 1992), en a d'ailleurs profité pour faire voter en catimini, mais à une quasi unanimité, un amendement constitutionnel majeur faisant du français la langue unique de la France. Était-ce dans un souci de la préserver de l'anglicisation progressive des moyens de communications et des techniques, ou bien encore une incitation pour les minorités immigrées (polonaises, italiennes, portugaises, maghrébines ou africaines) à s'intégrer,… ou bien encore de contraindre les minorités linguistiques et nationalitaires (alsaciens, basques, bretons, catalans, corses, occitans…) à s'assimiler une fois pour toute ? En tout état de cause, cet amendement est la réforme constitutionnelle la plus jacobine jamais adoptée depuis la fin de la Révolution française.

(1) NDLR : Cette révision a eu lieu en juin 1992 par la convocation commune de l'Assemblée nationale et du Sénat, réunis en Congrès du Parlement à Versailles, ouvrant la voie à un référendum, en septembre suivant, pour la ratification du traité de Maastricht.